“ a brighter day is coming my way. ” (abi, uesh)

« Nan, c'est mort, cet aprem' je suis pas dispo. » Il le regarde avec les yeux de quelqu'un qui est un peu choqué par ce qu'il vient d'entendre, puis il comprend finalement. « Ta mère t'oblige encore à faire du bénévolat, hein ? » Alors Liam hausse les épaules & feint d'être dégoûté. C'est juste une grosse blague, ça fait au moins deux mois qu'elle pense qu'il a arrêté – tant qu'elle ne l'apprend pas, tout va bien. Enfin, si ça finit par se savoir, au pire, il trouvera une excuse, comme toujours. « Dans l'mile, gros. Du coup je passe ce soir, j'emmène un p'tit quelque chose en guise de dédommagement. » Et, alors, sans même attendre une quelconque réponse, il s'en va. Rien à foutre de ce que son pote s'apprêtait à dire, hein – il a dit qu'il passerait, c'est tout, et il le fera, que quelqu'un s'y oppose ou pas. Car jamais Liam n'en a rien eu à foutre du regard des autres. Il est ce genre d'homme qui fait ce qu'il veut de sa vie, sans jamais se soucier du sucre qu'on peut bien lui casser sur le dos. On n'avance pas en penchant toujours la tête vers les autres pour savoir ce qu'ils racontent, de toute façon.

Il fait une chaleur à en crever et, l'espace d'une seconde, le blondinet réalise que c'était une très mauvaise idée de leur demander de venir à quatorze heures, alors que le soleil est à son zénith. Franchement, c'est limite s'il a pas envie de se casser & de prétendre avoir choppé un sale truc, tellement il sait qu'il va bouillir, sur cette plage. Allez, avec un peu d'chance, y'aura du vent ? Bof, le jeune homme n'y croit plus trop – ça fait un peu trop longtemps qu'il vit ici. Jetant un coup d'oeil sur son cellulaire, Liam réalise que s'il prend le chemin de la plage maintenant, alors il arrivera à l'heure – et c'est ainsi qu'il décide de faire demi-tour, s'aventurant alors au cœur de la ville, une idée bien précise en tête. Pour une fois qu'il s'apprête à faire quelque chose de sympa pour quelqu'un d'autre que lui-même, vaut mieux en profiter, franchement.
Lorsqu'il débarque sur la plage, il ne la reconnaît pas immédiatement, et se surprend alors à espérer secrètement qu'elle ait décidé de venir – enfin, qu'elle n'ait pas changé d'avis depuis la dernière fois, quoi. Le contraire serait franchement étonnant, puisqu'après tout, ce serait bien plus son style à lui de ne pas se pointer, qu'à elle. En parlant de pointer, le jeune homme se dirige vers les responsables, signe rapidement sa fiche de présence et s'éloigne bien vite – il n'a pas franchement envie de parler aux autres bénévoles, qui, forcément, doivent être vachement surpris de le voir ici, lui si retissant à l'idée de faire du volontariat quelque part. Et, alors, il la croise enfin – c'est drôle, lui qui haïssait ce foutu soleil quelques minutes auparavant, se surprend derechef à l'apprécier, juste parce que pour le coup, c'est lui qui rend la demoiselle encore plus magnifique. Et alors, comme il n'est pas bien certains qu'elle l'ait vu, il dégaine hors de son sac une bouteille de jus d'orange – le plus cher, le plus beau, t'sais – et le jette en direction de la demoiselle, criant un magnifique « REFLEXE ! » C'est à ce moment précis qu'il se demande à partir de quel moment elle va vraiment commencer à le détester.

Y’a des journées comme celle-là où on se réveille le matin et on a le sourire accroché aux lèvres. Parfois, c’est parce qu’on se souvient de la soirée qu’on a passé la veille et qu’on a juste envie d’y retourner et d’en profiter encore, parfois c’est plutôt le fait de savoir que la journée va être superbe et parfois on ne sait pas trop pourquoi, mais on ne se plaint pas. Ce matin-là, Abi se réveilla heureuse sans raison, elle était simplement de bonne humeur. C’est ce genre de bonheur qu’elle aimait par-dessus tout. Un bonheur tout simple, qui ne dépend de personne, qui lui vient tout seul, grâce au soleil, au repos et aux oiseaux qui gazouillent. Ça lui suffisait amplement, se dit-elle, alors qu’elle avalait un bol de céréales. À côté d’elle, il y avait une note rose où Abi reconnut l’écriture de sa grand-mère, celle-ci lui indiquait qu’elle était partie chez une des vieilles dames pour « jouer aux cartes ». Enfin, c’est ce qu’elles disent qu’elles font, mais soyons honnêtes, elles passent plutôt leur temps à potiner et à s’échanger des recettes. Abigail n’avait rien contre ça, qu’elles bavassent comme elles veulent, de toute façon il n’y avait rien à raconter sur elle.

Le fait que sa grand-mère soit partie signifiait qu’elle irait faire du bénévolat toute seule. Plus ça allait et plus elle se disait qu’elle était bien la seule à en faire dans cette famille, maintenant. Sa grand-mère trouvait toujours un prétexte pour s’absenter. Abi se prépara rapidement, elle adorait aller à la plage, alors c’était loin d’être une corvée pour elle. Lorsqu’elle avait commencé à faire du bénévolat, elle détestait ça, mais, maintenant, elle aimait ça, elle s’était liée d’amitié avec les autres personnes et s’était devenu un plaisir plutôt qu’un travail. Par contre, elle regrettait que ce ne soit pas payant, elle aurait vachement préféré travailler comme ça que les autres boulots qu’elle se tapait. Lorsqu’elle arriva sur la plage, la chaleur était étouffante. Le soleil brillait de toutes ses forces au creux du ciel. Elle observa du coin de l’œil l’eau qui brillait et soupira, elle avait oublié la torture que c’était d’observer l’eau fraiche alors qu’on meurt à la chaleur. Elle se jura d’y aller plus tard, alors qu’elle se dirigeait vers les autres bénévoles. Elle les salua, un grand sourire aux lèvres, probablement avaient-ils remarqué le bonheur nouveau qui s’affichait sur son visage, mais ils n’en firent aucune remarque.

Alors qu’elle signait la feuille de présence, son regard s’arrêta sur celui juste en dessous du sien. « Encore lui… » se dit-elle, en soupirant. Peut-être que la journée serait moins belle que prévu, mais ça c’était s’il se pointait, ce qui ne la surprendrait pas plus qu’il faut, puisqu’il semblait prendre un malin plaisir à l’embêter. Elle enfila ensuite un des t-shirts à vendre par-dessus celui qu’elle portait déjà et marmonna qu’elle allait avoir vachement chaud habillée comme ça avant de s’éloigner des autres bénévoles pour aller un peu plus loin sur la plage. Un soudain besoin de solitude lui avait prise et encore plus de ruminer contre ce mec qui réussissait à lui gâcher la journée alors qu’il n’était même pas présent. C’est pile à ce moment qu’un imbécile cria « RÉFLEXE » et, alors qu’elle se tournait pour comprendre, elle reçut en pleine gueule sa foutu bouteille de jus d’orange qu’elle attrapa avant qu’elle ne tombe à terre. Abi observa la bouteille pendant quelques secondes et leva les yeux pour croiser ceux du jeune homme. Son cœur fit un bond en rencontrant ses yeux, mais, bien vite, elle comprit que c’était cet imbécile qui venait de lui lancer une bouteille en pleine gueule. « Merde, t’es complètement taré ! T’aurais pu m’casser le nez, t’as quoi, quatre ans ? » gueula-t-elle aussitôt, en croisant les bras. Elle jeta un autre regard à la bouteille. Cet idiot semblait dédier sa vie à la faire chier et, le pire, c’était qu’elle était absolument incapable de le détester. Il la rendait furieuse, pourtant et elle n’était pas le genre de nana à être incapable d’haïr, mais la gueule de ce mec-là… Il avait un truc qui l’empêchait de le détester. Elle soupira en ouvrant la bouteille, n’empêche c’était dommage de gaspiller du jus d’orange de si bonne qualité, se dit-elle, alors qu’elle en prenait une gorgée. « Hmmm, merci, il est vachement bon. » dit-elle avec un sourire avant de lui jeter au visage le reste de la bouteille. « J’espère que tu apprécies aussi ! » ajouta-t-elle avec un plus grand sourire devant sa tête de chien mouillé. N’empêche, il la transformait aussi en gosse de 4 ans, pensa-t-elle en éclatant de rire.

Il ne comprit pas immédiatement, car c’était un sentiment qu’il se forçait à refouler depuis si longtemps qu’il ne pouvait pas croire que ça lui arrivait maintenant. Au fond, Liam était juste un mec comme les autres – il était simplement un peu plus con que la moyenne, et son esprit était légèrement resté bloqué lorsqu’il avait dix, ou douze ans. Mais il n’était pas méchant, enfin pas trop et alors, sa sociabilité lui permettait de se faire des amis plutôt facilement. Juste, pas que des amis quoi. Du coup, il refoula cette pensée lorsqu’elle se présenta à lui &, comme à son habitude, se cacha derrière une blague de gosse – il préféra balancer une bouteille à la gueule de la demoiselle, plutôt que d’aller lui parler comme n’importe quel adulte l’aurait fait. En fait, peut-être qu’il aimait juste se faire remarquer, faire savoir qu’il était là au moment même où il pointait l’bout de son nez. De toute façon il n’avait jamais fait dans le conventionnel, et ça lui allait très bien – ça lui réussissait pas toujours, mais il n’en avait pas grand-chose à foutre.
Il ne l’avouerait sûrement jamais, mais il était content qu’elle soit là. En même temps, c’était carrément logique qu’elle vienne puisqu’elle était de ce genre-là, mais il avait quand même, quelque part, au fond de lui – genre dans un endroit bien caché, celui qui retient les pensées les plus inavouables, finalement – un peu flippé de ne pas la voir débarquer. Il s’était même surpris à l’imaginer malade, au fond de son lit – et c’est à ce moment précis qu’il se pinça le bras, comme pour se faire revenir à la réalité. Il pouvait pas penser des choses comme ça, pas lui – lui, il en avait rien à foutre des gens, il aimait bien sa petite personne & jamais il ne se souciait réellement de ce qui pouvait bien se passer dans la vie des autres. Du coup, il se contenta d’annoncer son arrivée d’une façon un peu originale puisqu’il balança simplement une bouteille à la gueule de la demoiselle – qui la rattrapa avec le plus de dextérité au monde. Il l’observa, un grand sourire aux lèvres tandis qu’elle pestait déjà contre lui & sa débilité. Le blondinet se contenta de hausser les épaules, au fond il n’en avait rien à foutre, il ne lui avait pas pété le nez ni rien d’autre alors, tout allait bien, nan ? Il ne trouva rien d’autre à ajouter qu’un simple « Ca va pleure pas, je t’ai rien abimé du tout, ça a même pas froissé un seul de tes vêtements ! » Il comprenait pas trop cette façon qu’avait les gens de s’énerver après à peu près tout ce qu’il pouvait faire ou dire, au fond ça n’avait jamais vraiment de conséquences alors c’était pas la peine de s’énerver, quoi. Il ne retint pas son sourire lorsqu’il la vit boire une gorgée de sa fameuse bouteille, finalement il n’avait pas fait ça pour rien, c’était plutôt cool. Sauf que voilà, il aurait dû se douter qu’elle avait une autre idée derrière la tête – il le comprit après s’être pris une bonne gorgée entière en pleine gueule. Littéralement. Il resta un instant silencieux, légèrement choqué de ce que venait de faire la demoiselle, puis il leva les yeux au ciel, réalisant que son tee-shirt & ses cheveux blonds étaient totalement trempés. « Voilà comment tu remercies les gens franchement, je suppose qu’on t’offre pas beaucoup de cadeaux, » lâcha-t-il faussement dégoûté. Observant du bout des doigts l’état désastreux de sa magnifique chevelure, il continua de l’emmerder un peu, mais avec des mots, cette fois. « Sérieux, t’as quoi, quatre ans ? » Il lui adressa finalement un joli clin d’œil qui voulait un peu dire ‘eh ouais, tu vois tu peux être aussi débile que moi’ avant de tout simplement retirer son tee-shirt. Le voilà maintenant torse-nu sur la plage – c’était plutôt adapté à la situation, franchement. Il déposa son vêtement trempé sur une chaise après s’être légèrement essuyé les cheveux ; ça le dérangeait pas spécialement d’avoir les cheveux mouillés, c’est juste que là ils étaient dégueulasses & qu’il puerait très prochainement le jeu d’orange. Bah, tant pis, hein. « Reste sur tes gardes tout l’après-midi, je te préviens je vais me venger. » Plus qu’une menace, c’était une annonce concrète de quelque chose qui commençait déjà à se préparer dans sa petite tête blonde. « Mais pas tout de suite, on n’est pas là pour jouer à ‘qui sera le plus immature’, franchement y’en a qui sont là pour bosser quoi. » Il haussa les épaules, faussement indigné devant la mauvaise blague de sa nouvelle pote – ou pas. En vérité, il était carrément ravie qu’elle commence à rentrer dans son petit jeu. « Et au fait… J’ai hâte de te voir crever de soif dans deux ou trois heures, quand tu commenceras à regretter ton geste. »

On ne se le cache pas, Abigail avait, depuis toujours, une habitude de s’énerver rapidement. Elle ne mâchait pas ses mots, au contraire il lui arrivait bien souvent de regretter ce qu’elle avait dit. Elle agissait avant de réfléchir. Il y en a qui racontent que c’est un bon trait de caractère, mais Abigail aurait bien aimé être l’une de ses personnes qui ne savent pas se décider, parfois. Elle avait le sang chaud, elle s’énervait facilement et les gens le savaient et la laissaient généralement tranquillement. Sauf Liam. Liam, au contraire, semblait éprouver un sacré plaisir à l’énerver et à lui faire voir rouge et plus ça allait et plus Abi se voyait entrer dans son jeu et plus ça l’énervait encore plus. Elle l’observa, trempé de la tête au pied et, honnêtement, elle ne regretta pas le moins du monde son geste. Ses cheveux étaient dégueulasses et ne parlons pas de l’état de son tee-shirt et, même si elle se serait sentie coupable avec n’importe qui d’autre, tout ce qu’elle avait envie de faire, c’était éclater de rire. Elle savait que Liam ne le prendrait pas mal, elle avait saisi ce côté-là de sa personnalité et juste de le savoir, de savoir que quelqu’un ne s’énerverait pas à cause d’une de ses conneries, ça lui suffisait. Juste pour ça, elle se surprit à penser pendant une seconde que ce mec n’était peut-être pas si terrible. Jusqu’à ce qu’il lui ramène l’une de ses remarques en pleine gueule. « Sérieux, t’as quoi, quatre ans ? » la nargua-t’il, avec un clin d’œil moqueur. Le clin d’œil suffit à énerver Abi qui ne se gêna pas pour le toiser d’un regard méchant. « Nan, mais quelle originalité. » rétorqua-t’elle en roulant des yeux. Ce mec, franchement.

Alors qu’elle fulminait sur la stupidité de Liam et sur la façon qu’il avait de toujours l’énerver, elle le vit bien du coin de l’œil en train d’enlever son tee-shirt et elle se jura aussitôt de ne pas le mâter. Surtout pas, surtout pas lui, ce mec ne la lâcherait pas pour le restant de ses jours s’il avait ce bonheur. Elle croisa les bras sur sa poitrine et fixa son regard sur les autres bénévoles. Ils devaient bien se marrer, n’empêche, à les regarder se jeter des bouteilles aux visages. Elle haussa les épaules, au pire ça ferait juste le tour de Perth. Pendant que ses pensées vagabondaient vers sa mamie qui, probablement, serait même au courant qu’elle avait jeté une bouteille au visage de Liam à la fin de la journée, Liam la menaça de faire pire. Elle se tourna vers lui et éclata de rire. « Ah ouais, tu crois ça ? j’dirais que celui qui devrait rester sur ses gardes, c’est bien toi. » se moqua-t’elle Enfin, elle se vantait et tout, mais elle n’avait absolument aucune idée de ce qu’elle pourrait faire pour en rajouter. Abigail avait beaucoup moins d’expérience dans ce domaine, les pièges et tout ça. Tout ce qu’elle savait faire, c’était agir sur le coup de l’impulsion. Elle haussa les épaules, au pire elle verrait bien, tant qu’elle restait sur ses gardes. Liam marmonna quelque chose sur le fait qu’elle allait regretter son geste et tout ça, et crever de soif. Elle haussa les épaules. « Au pire, je crèverai. On s’en fout. » lui répondit-elle avec un mouvement de la main. Comme si elle allait même lui laisser le bonheur de la voir regretter son geste, jamais. « J’vais me mettre au boulot, je suis là pour bosser, moi. » ajouta-t’elle avec un clin d’œil, en rigolant.

Deux heures à vendre des tee-shirts sur la plage, franchement, tu comprends vite le supplice. Tu te rends compte à quel point t’as qu’une foutu envie; entrer dans l’eau. Elle est là, elle te nargue alors que tu crèves sous le soleil qui te brûle la tête. Heureusement, Abi avait pensé à se couvrir de crème solaire, parce qu’elle serait déjà en était d’homard cuit à cette heure-là. Même s’il n’était plus à son zénith, le soleil frappait encore et toujours, sans relâche. Elle commençait à avoir hâte de le voir descendre du ciel. De plus, elle crevait de soif. Elle n’en parlait pas, mais elle regardait tous ses gens avec leurs foutus bouteilles et elle avait envie de leur en demander une gorgée. Liam riait de sa gueule avec la sienne, elle le sentait, elle le savait. Malgré tout, les deux heures étaient passées vite fait, elle s’approchait des gens, souriait gentiment et lançait son discours sur le tee-shirt et comment il est beau et comment il est confortable et comment les profits vont à une bonne cause et comment et comment et comment. Elle avait appris avec les différentes ventes organisées qu’elle avait plus de chance de vendre avec les mecs, donc elle ne se gênait pas pour s’approcher d’eux et leur lancer son plus beau sourire. Ils en avaient vendu un bon chiffre en deux heures et c’était l’heure de prendre une pause vachement méritée. Elle alla s’asseoir sur une chaise et étira ses jambes avec un sourire. Elle n’avait presque pas vu Liam des deux heures, se dit-elle alors qu’elle le cherchait, malgré elle, du regard. Elle n’avait pas oublié sa menace de tout à l’heure.

» (+) WINTER IS COMING
» ABI (+) get ready for the storm, it's coming